Onia ouvrit les yeux et respira un grand coup. Elle se trouvait au beau milieu de la place centrale de la ville, au coucher de soleil. Les nuages moutonneux traversaient paresseusement le ciel, virant progressivement au doré. Son bâton à la main, elle regarda Chiff, sa poupée qui lui grimaçait avec sa bouche en tissu. Les denier rayons de soleils se reflétaient dans ses perles noires qui lui servait d’yeux. La poupée semblait lui jeter un regard désapprobateur. La jeune femme était partie chercher des piments pour finir une recette qu’elle avait commencé. Bien sûr, elle n’avait pas pris la peine de vérifier si elle avait tout, c’est ainsi qu’elle s’était retrouvé assise par terre, dans la rue. Des gens lui jetaient des regards ennuyés ou énervés, ce qui laissait Onia de marbre.

   La jeune femme s’était posée pour réfléchir, et aussi pour reposer ses petites gambettes car elle commençait à avoir mal aux jambes à force de piétiner. Elle avait fait le tour des magasins de nourriture du quartier et n’avait rien trouvé qui ressemble à son fameux ingrédient. C’était bientôt l’hiver, et Onia avait souvent froid, elle s’emmitouflait alors dans son grand pull en laine. Cette fois, elle avait voulu voir si le piment, qu’elle n’avait jamais goûté, réchauffait autant que ce que prétendait sa réputation. Il restait une rue où l’étudiante n’avait pas encore mit son nez, rougit par la fraîcheur qui s’installait peu à peu. Elle étira ses jambes, puis bailla. Chiff semblait toujours se foutre d’elle, qui n’avait pas été capable en un soir de trouver un petit bout d’arbre. Onia la regarda un instant puis l’anima. Ses cheveux verts noués avec du tissu blanc ondulèrent doucement et la poupée se laissa glisser le long du bâton de sa marionnettiste. Elle s’avança ensuite d’un pas mal assuré au centre de la place. Ses petits bras boudinés branlants, elle s’arrêta devant une femme à la chevelure blanche.

- Bonjour. Il semblerait que soyez sur le chemin d’une petite boule de tissu… Déclara Onia, d’une voix mi amusé, mi gênée. Auriez vous l’amabilité de lui donner un gentil coup de pied pour qu’elle revienne à moi ?

Hors rp:

L’inconnue se baissa et ramassa la poupée puis se tourna vers elle. Bien que la femme lui parut méfiante quelques secondes, elle ne paraissait pas offensée par la maladresse de l'étudiante, qui ne regardait jamais vraiment où elle dirigeait sa poupée.

- Ta marionnette ne t’écoute pas ? demanda la guerrière, car elle avait un sabre qu’Onia voyait à présent.

La question perturba la jeune femme. Comment une poupée de chiffon pourrait-elle entendre ? Peut-être qu’en voyant agir les marionnettes seules, les gens pensaient qu’elles possédaient une sorte d’âme… L’étudiante regarda la poupée avec un nouvel intérêt. Se pouvait il qu’en envoyant régulièrement un petit souffle d’énergie dans un corps sans vie, il puisse développer des sens qui lui serait propres ?
Elle secoua la tête, elle ferai ses petites expériences plus tard. Le soleil avait déjà bien perdu du terrain et les premières étoiles commençaient à percer le ciel. Le froid aussi était présent, enveloppant la ville de son étreinte glaciale.

Onia frissonna avant de se relever péniblement, car elle se trouvait toujours les fesses par terre. Elle étira ses jambes engourdies et tendit la main vers la guerrière à la crinière blanche.

- Non, je ne crois pas que Chiff soit capable d’accomplir de tels prouesses… Pourriez vous me la remettre, s’il vous plaît? Et… ajouta la jeune femme de sa voix paisible, Est-ce que vous sauriez où l’on peut trouver du piment par ici ?

Si la guerrière se trouvait dans l’incapacité de lui dire où Onia pouvait trouver cet ingrédient bienfaiteur, l’étudiante rentrerait bredouille à l’académie. Et elle devrai manger son ragoût aux piments sans piment…

On lui avait souvent dit « Onia, les solutions ne tombent pas ciel, si tu veux les trouver il faut d’abord commencer par les chercher... », mais encore une fois la jeune femme avait la preuve du contraire. Enfin ici en l’occurrence il n’avait pas plut du piment, mais la guerrière semblait avoir une piste pour en dénicher.
Onia avait toujours trouvé les guerriers insensés. Pourquoi tenaient-ils tant à se battre ? Mais celle qui lui faisait face ne semblait pas si méchante. Même plutôt sympathique. D’une part elle lui avait remis sa poupée égarée et elle savait où trouver le petit bout d’arbre qu’elle avait cherché tout l’après-midi. Et surtout elle lui proposait de l’y accompagner.

- Avec plaisir, lui lança Onia d’un ton reconnaissant.

De plus la femme à la chevelure ivoirienne s’intéressait à son pouvoir ce qui arrivait rarement. D’ordinaire les gens le craignait, pensant qu’elle pouvait s’en aider pour leur faire des sales tours. La marionnettiste remit sa poupée sur son bâton et réfléchit à la meilleure façon d’expliquer comment elle l’animait.

- En fait, manipuler Chiff c’est un peu comme si tu la faisait bouger normalement mais sans la toucher. Commença le jeune femme, par exemple si je veux lui faire bouger la tête, je fais juste ça.

Par "ça", Onia entendait un rapide mouvement de doigts qu’elle exécuta d’un geste vif. Le petit bout de chiffon tourna alors son visage vers la guerrière faisant voler ses cheveux verts. Sa bouche était toujours tordue dans son espèce de sourire qui lui donnait un air dément.
L’étudiante continua son explication sur un ton enjoué, bien qu’un peu flâneur. Elle continua en lui disant que plus on utilisait son pouvoir, plus c’était fatiguant, que si on était trop loin un simple ordre devenait un effort énorme, que des choses qui pouvait paraître simples pouvait en réalité demander des heures d’entraînement…
Elle fur interrompue par son ventre qui gargouilla. Onia s’arrêta de parler d'un coup, réalisant qu'il faisait nuit et qu'elle n'avait toujours pas mangé. Et que la guerrière ne désirait peut-être pas tous les détails de son apprentissage...

- Euh, désolé. On peut aller voir pour les piments? Demanda brusquement adolescente.

Voyant que la guerrière s'intéressait à son pouvoir, Onia souri. Elle se rendait à présent compte que parler de cela lui faisait du bien. Pour une fois elle n'avait pas l'impression d'être une étrangère qui parlait dans une langue perdue, ni jugée comme un démon aux mille pouvoirs. Et bien qu'elle ne fut pas touchée des remarques pas toujours bien réfléchies de ces camarades, elle se sentait plus à l'aise avec cette femme qu'au sein de son école. Elle jeta un bref coup d’œil à Chiff, qui semblait déterminée à vouloir se casser la figure. Onia lui donna un petit coup pour la remettre en place, dans un équilibre précaire en haut de son bâton. L'étudiante se demandait pourquoi on lui trouvait un air méchant, elle lui trouvait plutôt un air maladroit, bien qu'un peu fou.

La guerrière, Reiko Ryû lui dit-elle, ne parut pas offensée de l’interruption inattendue de son ventre. Elle l'avait guidé jusqu'à une échoppe qu'Onia n'avait jamais vue. L'intérieur était lumineux malgré la noirceur de la nuit qui s'annonçait. Une odeur que la jeune femme ne reconnut pas vint doucement flotter jusqu'à son nez rougit par le froid. Il faisait bon dans ce petit magasin et il présentait de nombreuses denrées qu'Onia ne connaissait pas. Divers fruits et légumes de formes étranges et des couleurs exotiques y étaient installés. Elle fouilla du regard sans succès les étals pour dénicher quelque aliment qui ressemblait à du piment. Trop de choses étaient présentées sous ses yeux et elle n'arrivait pas à s'y retrouver.

Une voix se fit entendre, tirant la marionnettiste de son observation scrupuleuse des étalages.
- Bonsoir Mesdames! Que me vaut l'honneur de cette petite visite?

- Le piment, répondit Onia sans se retourner, et sans plus réfléchir. Puis se souvenant des règles de politesse, l'étudiante fit face à son interlocutrice. La voix provenait d'une bonne-femme rondouillarde dont les petits yeux furetait les deux arrivantes.

Spoiler:

Onia se laissa guider jusqu’à ses chers piments. Ils étaient plus petits que ce qu’elle imaginait. Et ils en existait de nombreuses sortes, de toutes les couleurs. Ravie la jeune femme décida de prendre de tout pour pratiquer des expériences culinaires… La gérante finit par lui expliquer toutes les particularités et les différences entre tous piments, voyant le mélange d’enthousiasme et de manque de connaissance de l’étudiante. Elle lui confia même des recettes pour les rendre plus goûteux.

La jeune femme se retrouva donc avec une quinzaine de piments dans les bras. Une fois qu'elle eu fini ses petites emplettes, elle se tourna avec un grand sourire au lèvres vers celle qui lui avait permit de trouver ces petits trésors.

- Heu... Merci. Lui dit Onia avec reconnaissance.

Son ventre lui répondit avant la guerrière. Onia fronça les sourcils. Ne pouvait il pas se taire un instant? Bon puisqu'il le souhait, et que voir toues ces couleurs lui avait ouvert l'appétit, l'étudiante décida de goûter les fameux piments. Elle en prit un petit et le croqua. Une chaleur étouffante lui monta des entrailles jusque dans sa gorge. Elle se mit à tousser, le rouge aux joues. Les larmes aux yeux, elle releva la tête vers Reiko Ryû puis elle se mit à rire.

- Vous en voulez aussi? réussit-elle à articuler.

Après avoir repris un peu ses couleurs normales, Onia tendit un piment que la vendeuse lui avait décrit comme "doux" à Reiko.

- Un qui fait pas tousser trop fort, lui précisa la jeune femme avec un sourire.

Elle jeta en vague regard en direction de la fenêtre. Il faisait à présent nuit noire, et on pouvait observer à souhait les étoiles dansante dans les cieux. Une pensée pas très enthousiaste vient se frayer un chemin dans la tête de l'adolescente. Et elle tenait en deux mots "couvre feu". La jeune se mordilla la joue. Il fallait qu'elle se dépêche de rentrer si elle ne voulait pas dormir dehors. Les étoiles avaient beau être belles, elles étaient bien trop loin pour la réchauffer…

- Heu, fit elle. Je crois qu'il faut que je rentre. J'espère que je pourrai vous revoir un jour, vous êtes très gentille.


Après avoir salué la guerrière, et chaudement remercié la vendeuse, Onia sorti de la boutique et se glissa dehors. Dans la nuit, elle souriait en remerciant on ne sait qui pour cette rencontre. La jeune femme avait passé un bon moment en agréable compagnie. Elle avait fait une découverte majeure: un tout petit bout d'arbre était bel et bien capable de la réchauffer. Et surtout, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas parlé aussi librement avec quelqu'un. D'autant plus que ce quelqu'un avait été fort sympathique.
Il n'y avait pas grand monde dans les rues à cette heure tardive et la jeune femme regagna l'académie. Elle se faufila jusqu'au cuisines où elle avait laissé en plan sa recette.

Spoiler: